Les véhicules électriques vont prolonger la crise de l’énergie
Par Simone Wapler
4 novembre 2022
 
Sous la pression des écologistes, l’Europe interdit la commercialisation des voitures à moteurs thermiques en 2035. Mais le réseau électrique ne sera pas prêt à assurer les recharges. Sauf retour au réalisme, la crise de l’énergie risque de durer.
 
La semaine dernière, je vous parlais de l’inflation. Tout le monde s’attend à ce qu’elle se calme en raison de la hausse des taux directeurs pratiquée par les banques centrales et de la récession que cela devrait provoquer.
 
Pourtant l’inflation persiste même si les taux de croissance faiblissent déjà. En début d’année, le Fonds monétaire international prévoyait 2,3% de croissance en Europe. Le FMI vient de réviser sa prévision à 0,5%. Aux Etats-Unis, après deux trimestres de recul du PIB, l’activité économique rebondit toutefois à 2,3% pour le troisième trimestre 2022. Les chiffres d’inflation, eux, restent encore robustes. Dur, dur, d’être un grand planificateur omniscient par les temps qui courent…
 
En pratique, malgré le fléchissement de l’activité, la distribution d’argent gratuit qui se poursuit nourrit la hausse des prix. Mais ce n’est pas le seul facteur : les nombreuses contraintes et réglementations écologiques - supposées nous sauver de la rôtissoire planétaire que nous alimentons en brûlant gaz, pétrole et charbon – gonflent aussi les prix.
 
Pour bien mesurer le danger qui nous attend, voici les variations climatiques depuis plus de 10 000 ans :

Comme vous le voyez, l’humanité en a connu d’autres. Et ces réchauffements furent des périodes favorables aux conditions de vie de l’humanité. Mais la pauvre petite Greta Thunberg a peur du climat plus que du grand méchant loup et quand une idée est ancrée dans l’opinion publique, inutile de la combattre…

Des décisions idiotes pour combattre la fin du monde
 
Ce n’est pas parce qu’ils sont incapables de lutter contre l’inflation, la pauvreté ou la guerre que nos élus et technocrates vont baisser les bras pour le climat. Pour plaire aux écologistes, des mesures contraignantes s’abattent sur nos têtes :
 
· Développer les énergies dites « renouvelables » dont la principale caractéristique est d’être intermittentes.
 
· Abandonner l’énergie nucléaire bien que le seul accident mortel (Tchernobyl) soit imputable à l’impéritie d’un État en effondrement (l’ex-URSS).
 
Ces deux idées permettent déjà de saborder le réseau électrique à l’échelle de l’Europe mais le naufrage n’était pas probablement assez rapide.
 
D’où la dernière idée lumineuse de la Commission européenne : interdire la commercialisation des voitures et utilitaires légers à moteur à explosion en 2035. « Décision historique de l’UE pour le climat » a twitté l’eurodéputé Pascal Canfin. Cette décision historique a notamment trois conséquences :
 
1. Couler l’industrie automobile européenne[1] qui n’avait pas jusqu’à présent développé ce type de véhicules faute d’avantages pour le client et donc de demande.
 
« Je ne vois pas aujourd'hui la classe moyenne capable d'acheter des voitures électriques à 30.000 € […] Dans un monde où les taux d'intérêt augmentent, le niveau d'aide donné aujourd'hui pour un véhicule électrique n'est pas tenable »
 
Carlos Tavarès, Pdg de Stellantis, cité par Capital
 
2. Créer un besoin en bornes de recharges qui sont pour le moment en quantité insuffisante. Ce besoin sera financé par l’impôt ou la dette.
 
3. Augmenter la contrainte sur un réseau électrique déjà à bout de souffle.
 
Ce dernier point est généralement passé sous silence par nos brillants planificateurs. Il mérite une explication.
 
Des véhicules électriques sans suffisamment d’électricité
 
En 2021, les véhicules électriques ont représenté 10% des ventes en Europe selon L’Automobile , même si l’engouement reste encore faible dans beaucoup de grands pays européens (France, Allemagne, Italie).
 
Si le rythme se poursuit, en 2035, la consommation des véhicules électriques représenterait environ 7% de la consommation d’électricité en Europe. Ce qui peut paraître supportable[2]. Mais si l’on suppose qu’à terme, les 64 millions de véhicules du parc européen deviennent électriques, leur consommation représentera 25% de la production actuelle d’électricité[3]. Or celle-ci est déjà trop juste.
 
Même si un retour en grâce du nucléaire se produisait, compte-tenu de la durée de déploiement de nouvelles centrales nucléaires, l’électricité ne sera pas au rendez-vous à temps.
 
« Penser que le véhicule électrique va remplacer le moteur à combustion interne comme les mécaniciens ont remplacé les maréchaux-ferrants, c’est prendre un grand risque. […]. Le marché aurait dû décider si le véhicule électrique doit supplanter le thermique, mais la course à la diabolisation du CO₂ est plus forte que le marché. Lorsque le marché exercera des représailles — comme il est en train de le faire actuellement étant donné les errements de ce qu’on ne devrait même pas appeler une politique énergétique européenne — l’UE devra payer cher cette erreur stratégique pendant de nombreuses années. »
Samuele Furfari, président de la Société européenne des ingénieurs et industriels
 
Nous allons payer cher les conséquences de ces décisions idiotes. La facture sera probablement acquittée sous forme d’inflation (hausse des prix de l’énergie) et d’affaiblissement de l’euro.
 
Signe avant-coureur de crise, les désaccords s’intensifient au sein de la Zone euro. Ainsi l’Allemagne vient de dire nein à un emprunt commun pour financer les plans de soutien nationaux contre la hausse des coûts énergétiques. Cela coûtera moins cher si chaque pays emprunte individuellement, a indiqué le ministre des Finances allemand... La formulation exacte serait plutôt « cela coûtera moins cher à l’Allemagne… ».

[1] 13 millions d'Européens, soit 7% du marché de l'emploi dans l'UE, selon l'Association des constructeurs européens (ACEA)
[2] Hypothèse sur 64 millions de véhicules électriques circulant en 2035 sur un parc automobile total de 235 millions avec une consommation unitaire de 20 kWh pour 100 km et 15 000 km parcouru par an.

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A propos de Simone Wapler

Ex-ingénieur en aéronautique, Mme Wapler écrit depuis une vingtaine des années au sujet des actualités politiques et économiques en France, sous un angle basé dans l'école économique Autrichienne. Elle est l'auteur de nombreux livres, disponibles sur Amazon, dont son plus récent Money, Monnaie, Monnaies. Aujourd'hui, elle intervient fréquemment dans des médias alternatifs, et participe, aux côtés d'un petit groupe d'experts aux idées alignées avec son propre point de vue, à pousser de l'avant leurs analyses et avertissements pour les particuliers.
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